Conservatoire national des arts et métiers
Architectures des systèmes informatiques
CHAPITRE 1
Origine et évolutions des architectures
Année 2002-2003

Suite N°10...

La démocratie ? C'est une personne avec un ordinateur.
      Steve Jobs, fondateur d'Apple Computers.

1.7. LES ANNÉES 1970

En 1960, le réseau SAGE était installé. En 1970, ARPAnet, premier réseau informatique pour la recherche (Advanced Research Projects AgencyNETork) fonctionne. Il est conçu à l'origine par le Département américain de la défense. La question posée est : comment conserver la capacité à communiquer point à point dans un réseau alors que des nœuds ou des liaisons sont en panne. Pour cela il faut construire un vrai grand réseau. Comme il n'est pas question de surcharger les opérateurs militaires en les faisant jouer avec ce réseau, autant le mettre à la disposition des services universitaires civils sous contrat. Ils en feront le test gratuitement et cela pourra leur être utile.

Chaque ordinateur à une adresse. N'importe quel ordinateur peut communiquer avec n'importe quel autre. En cas de défaillance d'une liaison, ARPAnet oriente la communication par un autre chemin dans le réseau. On garde ainsi le réseau en état de marche, même si l'un des nœuds tombe en panne. Le protocole est nommé «internet protocol» (IP). ARPAnet est une réussite. Il sera divisé en deux, MILnet pour les sites militaires et un ARPAnet civil qui deviendra Internet.

Dans cette décennie, on continue à concevoir de nouveaux ordinateurs, grands, moyens et petits, industriels également comme les séries T1000 et T2000 de La Télémécanique en 1971. Néanmoins l'innovation porteuse d'avenir se trouve toujours dans l'électronique.

Les microprocesseursLe microprocesseur, ensemble de circuits fondamentaux d'un ordinateur regroupés sur un circuit intégré unique, est créé chez Intel en 1971 par une équipe constituée de Federico Faggin, Marcian E. (dit Ted) Hoff et Stan Mazor. Ils logent tous les composants d'une unité centrale dans un seul circuit intégré, logique de commande, séquenceur et opérateurs arithmétiques et logiques. C'est le premier microprocesseur nommé 4004. Ses registres ont 4 bits, il a été conçu à la demande du Japonais Busicom pour une utilisation en horlogerie et non comme processeur d'un ordinateur.

La première publicité pour le 4004 reprend une couverture d'Electronic News, pendant l'automne 1971: 

«Un ordinateur micro-programmable(sic!) sur une puce ?»

Le schéma de câblage est accessible par l'image du 4004.

Intel 4004

La même année, Alan Shugart d'IBM installe un lecteur de disquette 8 pouces sur une machine à écrire, la DISPLAYWRITER.

En avril 1972, Intel produit le 8008, registres de 8 bits, avec 3500 transistors, fonctionnant à 108 kHz, adressant 16Ko.
 
 

Le 8008 est la base du Micral N, de mai 1973. C'est le premier micro-ordinateur intégré. Ce n'est pas un kit à monter. Il est conçu chez Réalisations électriques et électroniques (REE) par François Gernelle pour la régulation automatique pour satisfaire une commande de l'INRA. André Truong Trong Thi, qui avait fondé et dirigeait la société le commercialise comme ordinateur universel sous le nom de Micral-N. Son logiciel est dû à Philippe Kahn.

Ci-contre une partie de la face avant d'un Micral-8 à base de 8080.

Le mot microcomputer apparaît aux États-Unis en juin 73 dans la revue Byte, pour désigner cette machine. La société R2E sera ultérieurement achetée et stérilisée par Bull en 1982.

Au milieu de la même année 73, la Scelbi Computer Consulting Company présente le Scelbi-8H, kit à 565 dollars avec 1ko de mémoire.

Un ancien ingénieur de l'Air Force, Ed Roberts avec William Yates et Jim Bybee, utilise le 8008 pour construire le MITS Altair ou Altaïr 8800. Dans sa version de base à 375 dollars il a 256 octets de mémoire, ni clavier, ni écran ni disquette. Peu après, Paul Allen et Bill Gates écrivent un compilateur Basic pour l'Altaïr.

Ce premier microprocesseur est rapidement suivi par des réalisations dans deux directions :

Cette technique de tranches combinait, au prix d'une plus grande complexité de mise en œuvre :
.la capacité de construire des machines dont le mot était beaucoup plus long que la technique ne l'autorisait en une seule puce : l'IMP16 avait des mots de 16 bits en 1974 (ce fut le premier micro-ordinateur acquis par le CNAM), alors que les premières puces à mots de 16 bits apparaîtront en 1978;
.la microprogrammabilité, indispensable pour la mise en œuvre ci-dessus, qui se révélait efficace et formatrice dès lors qu'on n'achetait pas un micro-ordinateur déjà tout monté.Les microprocesseurs en une puce ou en tranches ont la même architecture et les mêmes principes que les processeurs conventionnels. Ils en diffèrent par leurs dimensions très petites, leurs prix incomparablement moindres et, à leurs débuts au moins, par des performances médiocres. Les deux premières différences sont essentielles pour leur diffusion et leur réussite sur le marché, les performances suivront. On trouvera un historique succinct des microprocesseurs de Motorola et d'Intel dans l'annexe asi0008.

On a pris l'habitude de nommer ordinateurs personnels (personal computers) les machines à base de microprocesseurs. Cette expression avait déjà été utilisée pour le LINC du MIT en 1963, le Datapoint 200 de CTC en 1971, l'Alto de Xerox en 1973 et d'autres. En 1967, IBM produisait le 610 Auto-Point Computer, présenté comme «IBM's first personal computer» car il était conçu pour n'avoir qu'un seul utilisateur. Ces machines étaient chères et toujours destinées à un marché professionnel.

L'affaire Cyclades

En 1972, Louis Pouzin, directeur des projets pilotes à l'INRIA, ancien du MIT et acteur du projet CTSS, obtient de la délégation à l'informatique (organisme du Plan-calcul) le financement du projet Cyclades sans qu'aucun industriel ne soit associé à l'opération. Il s'agit, à la façon d'Arpanet et avec des novations techniques intéressantes, de mettre des grands ordinateurs, universitaires pour la plupart en réseau. C'est une bonne préfiguration d'internet. Un prototype fonctionne en 1973. À l'automne 1973, Cyclades est présenté au ministre de l'industrie et au directeur général des télécommunications.

La situation évolue ensuite jusqu'à la fermeture de Cyclades en 1978 :

Le réseau internet reprendra les acquis d'Arpanet et plusieurs techniques TCP/IP de Cyclades.Les autres techniques

En 1971 apparaît le nom de disque Winchester, disque à têtes mobiles contenu dans une enceinte sous vide partiel. Pour la petite histoire, l'origine de la dénomination est controversée et trois explications sont données. Les deux premières citent IBM. Dans la première, Winchester était le nom de l'unité de disque 3030 (deux fois 30 Mo de capacité), le même que celui de la très fameuse carabine Winchester. Dans la seconde, Winchester viendrait du nom d'une ville de l'État de New York où existe un laboratoire IBM de recherche sur les disques. La troisième fait état de ce que les principaux fabricants de disques étaient installés dans la vallée du silicium entre San José et Palo Alto, le long de Winchester road, principale artère de San José.

En 1972, les premières fibres optiques sont fabriquées. Elles transmettent la lumière avec une atténuation inférieure à 20 dB/Km, c'est-à-dire dans les mêmes valeurs que le plus moderne des coaxiaux d'alors le 60 MHz à 10800 voies téléphoniques. En 1974 Corning Glass montre qu'il est possible de limiter l'atténuation à 4 dB/Km avec une silice de grande pureté. En 1976 les premiers systèmes complets de transmission sont en maquettes dans des laboratoires.

En 1974, Gary Kildall propose CP/M comme premier système d'exploitation destiné aux plate formes 8 bits quelconques.

La société Zilog est fondée pour produire des microprocesseurs concurrents des 8080 et 8085 d'Intel.

Le progrès continu et très rapide de l'intégration électronique à grande échelle a manifestement bouleversé les techniques matérielles et par conséquence, les techniques logicielles de l'informatique. Cela tient à la disponibilité à coûts décroissants de composants électroniques de capacité croissante. L'économie de l'informatique se définit de plus en plus en termes de marchés nouveaux, de langages, d'ergonomie du logiciel et de production en série des logiciels aussi bien de base que d'application.

Les grands ordinateurs et encore plus les périphériques contiennent des microprocesseurs ou des microcontrôleurs qui en sont dérivés.

À la fin de cette décennie, la moisson d'idées nouvelles est maigre mais la diffusion des matériels s'amplifie, faisant que le micro-ordinateur passe du statut d'invention à celui d'innovation économique.

En 1975, un projet est entrepris chez IBM qui aboutira à la première machine RISC. Elle provient de l'observation par Knuth puis par John Cocke de ce que seul un petit nombre d'instructions du jeu sont employés. Cocke définit un petit système de gestion de central téléphonique qui deviendra le miniordinateur 801 [HOP87].
IBM lance un nouveau «personal computer», nommé 5100; il n'a pas de succès. Plus tard un autre projet d'IBM sera le System 23/Data Master, basé sur le processeur 8085. Il arrivera trop tard alors que les microprocesseurs à 16 bits sont déjà en production.

En 1976, Microsoft et Apple Computers sont fondés. Le premier produit des logiciels, le second créé par Steve Jobs et Steve Wozniak produit l'Apple II, avec clavier et écran, son succès est immédiat.

En 1977, l'Apple II coûte 1298 dollars, le PET de Commodore 795 dollars. Tandy-Radio Shack lance le TRS-80.

En 1978, Visicalc, un tableur pour Apple II est écrit par deux étudiants, Daniel Bricklin et Bob Frankston. Il est le premier logiciel d'application à très grande diffusion à partir de 1979. En 1979, Wordstar, de Micropro International est le premier traitement de texte de grande diffusion.

En 1980, Alan Shugart quitte IBM et crée Shugart Associates. Il prend la tête du développement des lecteurs de disquettes et des disques Winchester pour micro ordinateurs.

En 1979, une configuration typique de micro-ordinateur contient et vaut en francs TTC de 1979 :

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